Ce mois-ci, dans son article intitulé « Le désir de certains enfants de tout connaître d’un sujet », Arielle Adda se penche sur ces enfants qui explorent un sujet qui les passionne aussi loin que possible.
Son analyse porte à la fois sur le sentiment de toute puissance fourni par la « maîtrise » en profondeur de sujets parfois complexes, et sur les raisons plus existentielles qui se cacheraient derrière une quête acharnée.
Elle y voit à la fois une grande capacité à apprendre, retenir et analyser un sujet, fortement liée à la curiosité même de l’enfant à haut potentiel, associée à un risque de retranchement dans un domaine d’activité précis et déterminé qui se voudrait rassurant. Voici ce qu’elle conseille
Ne pas se laisser piéger par cette passion pour un domaine précis. Elle recouvre un océan d’interrogations douloureuses et angoissantes qu’elle permet d’apaiser pour un temps en procurant un cache qu’un enfant doué sait déguiser en séduisante couverture. Tenter alors d’aborder avec lui ces questions qu’il se refuse à poser par peur d’entendre des réponses plus angoissantes encore, mais on ne peut pas le laisser dans cette illusion de toute puissance, à moins que ces recherches soient inspirées par une véritable vocation, dans ce cas, le sujet même de cette recherche passionnée constitue un indice clair.
Je ressens à travers cet article une alerte face à un comportement qui, si l’on n’y fait pas attention, pourrait se transformer en une forme de repli. Il y a aussi une probabilité pour qu’une curiosité excessive ou une mémoire exceptionnelle s’apparente à une forme de TSA. C’est à l’intensité de ces préoccupations et à leur permanence dans le temps qu’il faut être attentif pour en décrypter le fondement. A nous parents aussi d’être attentifs
Quelle que soit sa raison, cette quête profonde répond à un moment donné au besoin qu’a l’enfant de nourrir sa curiosité, d’apprendre, de s’enrichir, de mettre en œuvre des stratégies de mémorisation et de recherche.
Elle peut par contre être nuisible selon le regard porté par l’entourage sur ces facultés :
Cette aisance et cette culture qui suscitent l’admiration de l’entourage sont rassurantes : elles prouvent qu’existe la possibilité de posséder un savoir spécifique qui ne laisse aucun détail dans l’ombre.
Veillons à ne pas transformer un besoin profond et intime de compréhension de son environnement, qu’il est nécessaire d’accompagner, en une marque de reconnaissance unique qui ferait toute la personnalité d’un enfant et nourrirait un ego démesuré. Il nous appartient à ce titre d’interagir et d’échanger avec ces enfants dans leurs recherches afin de leur faire partager leurs trouvailles mais pas de les exposer comme des singes savants. Ils ont, je crois, beaucoup de plaisir à nous faire part de leurs découvertes mais, à leur corps défendant, ne trouvent pas toujours un écho favorable, car nous ne sommes pas forcément attentifs, disponibles ou disposés à écouter un long déroulement sur la passion du moment. Cela aussi peut favoriser chez eux un renfermement voire une amplification de leur besoin initial.
Ce désir de connaissance et de compréhension, lorsqu’il est bien nourri et trouve une place équilibrée dans la vie des enfants, est effectivement une grande chance d’accomplissement personnel et peut être annonciateur d’un futur orienté vers la recherche par exemple.
J’ai évoqué un lien ou une confusion possible, entre haut potentiel et TSA. A ce propos je recommande fortement la lecture du livre de Paul El Kharrat, « Bienvenue dans mon monde« , reconnu pour sa mémoire phénoménale dans l’émission les douze coups de midi. Son ouvrage explique remarquablement bien à quel point ses passions et sa sensibilité se nourrissent l’une de l’autre et combien il lui a été difficile de se faire comprendre.
Ce sujet vous parle ou vous vous interrogez dessus ? Votre enfant entretient-il une passion intense ? Comment l’explore t-il ? Parvenez-vous à le suivre ? Est-ce selon vous, bénéfique, symptomatique ? Faites-nous part de vos commentaires.
Lire la chronique entière sur le site du Journal des Femmes
Bonjour,
Je voudrais rebondir sur le lien fait dans votre article entre l’investissement dans un domaine et le besoin d’être rassuré sans laisser aucun détail de côté.
Pour ma part, je ne vis absolument pas mes passions ni le temps et l’énergie consacrés en lien avec une peur existentielle. En effet, plus j’explore un domaine, plus j’en vois la profondeur que je n’engloberai jamais. L’effet serait donc tout à fait opposé… Il n’y a que le nouvellement initié pour avoir une confiance absolue !
Découvrir le monde est un émerveillement en soi, qui soulève à chaque pas un foisonnement de questions, qui sont autant de garanties d’un monde infini à explorer, plutôt qu’une chute vertigineuse sur l’insaisissable.
Les angoisses que je peux rencontrer sont plutôt liées aux barrières posées par autrui et le manque de partage de mes passions. J’ai travaillé en Recherche fondamentale pendant plusieurs années, quel bonheur inestimable que de vivre avec d’autres neuroatypiques et hauts potentiels intellectuels toutes nos interrogations et savoirs spécifiques !
Il me parait plus raisonnable de dire qu’investir ses passions permet au haut potentiel tout comme à l’autiste de pouvoir rassurer des peurs engendrées par ailleurs, surtout lorsqu’il y a frustration. Mais qui n’a pas recours à son monde intérieur, son univers familier, son jardin intime, ses petits plaisirs pour adoucir ses angoisses ?
Je vous remercie pour les articles que vous écrivez et que je lis toujours avec grande émotion.
Bonjour,
En vous lisant j’ai reconnu mon fils.
Petit il s’est pris de passion pour les transports et les trains/métros en particulier. Il regardait des vidéos de train plutôt que des dessins animés. Il connaissait et connait le numéro des rames des métros… Les différentes lignes etc
Il s’est ensuite interressé aux ascenseurs et depuis que nous avons pris l’avion il rêve d être pilote. Il passe son temps sur des simulateurs de vols.Il connait les flottes, compagnies, noms d’aéroports etc
Nous allons l’orienter vers le BIA qui lui permettra de se rendre compte si son envie se confirme. Concernant les angoisses, il est hyperémotif et a une grande peur de l’abandon. Il a été suivi pdt 1 an.
Nous essayons de l’accompagner au mieux tout en lui proposant d’autres activités (il chante) et sommes pas mal derrière lui pour les devoirs.
Le plus difficile est de trouver le bon dosage
Bonjour, je me permets de vous écrire car j ai l impression de reconnaître mon fils quand je vous lis. Mon fils a aujourd hui 7ans et depuis tout petit, il a entretenu plusieurs passion (une a la fois) : les horloges, les mètres, les stylos, l espace, la météo, les tours et montagnes. Il a également une forte peur d abandon et est très sensible. J ai l impression que votre fils est plus grand et j aurai aimé pouvoir échanger afin que vous puissiez me partager votre expérience?
Merci
Bonjour Brinon,
Merci pour votre commentaire et votre enthousiasme !
Je suis plutôt d’accord avec vous et ne perçois pas non plus la quête de connaissances comme un comportement symptomatique mais à l’inverse comme le besoin de satisfaire une curiosité insatiable qu’ile st parfois difficile de partager avec autrui.
Votre vison me plaît beaucoup, merci !